Le manque
- Thérèse Clavel
- 21 avr.
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 24 avr.

Et si le manque n’était pas un problème à résoudre, mais un appel à me retrouver ?
Dans mon mode de fonctionnement ordinaire, souvent automatique, lorsque je ressens un manque, j’ai tendance à chercher instinctivement à le combler par une réponse extérieure. Je me tourne alors vers « plus de quelque chose » à l’extérieur de moi — nourriture, argent, relations, activités, distractions… Cette manière de répondre au manque m’occupe, me donne l’impression d’un mieux-être. Et parfois, oui, cette stratégie « fonctionne ». En termes de survie, elle est efficace.
Mais tôt ou tard, je me rends compte que je reviens inlassablement à cette même sensation de vide. Car ce manque est en réalité un état intérieur, une expérience qui appelle à être accueillie et reconnue pour ce qu’elle est : une séparation d’avec moi-même, un éloignement du contact intime avec mon être.
En cherchant une réponse à l’extérieur, je ne réalise pas que je valide, malgré moi, l’idée qu’il me manque quelque chose. J’installe alors en moi une croyance de manque matériel, qui finit par devenir réalité. Plus je crois manquer, plus je nourris cette sensation de manque, et plus je deviens dépendant(e) de ce que je crois devoir posséder à l’extérieur de moi.
Ce qui est profondément transformateur, c’est de voir que ces situations de manque me forcent à emprunter un chemin de retour vers moi-même. Le manque extérieur n’est qu’un miroir, le reflet d’un manque d’amour de moi, un manque de présence à moi-m’aime. Il vient me rappeler à moi-même, me parler de ces parts de moi restées ignorées, abandonnées, mises de côté, par inconscience ou par nécessité de survie.
Ce manque m’invite à m’arrêter, à tourner le regard vers l’intérieur. Il me pousse à écouter ce qui est là, à reconnaître mon besoin réel, à m’ouvrir à la réalité de l’instant avec tous mes sens. Il m’appelle à revenir ici et maintenant, au centre de moi-même, dans l’expérience directe de la Vie, hors des récits mentaux que je me raconte sur moi, les autres, le monde.
Dans l’état de conscience ordinaire, je fonctionne sur pilote automatique, régi(e) par mes conditionnements, mes peurs, mes schémas hérités de l’environnement. Ce pilote intérieur prend les commandes avant même que je n’aie eu le temps d’en être conscient(e). C’est plus fort que moi — et c’est, après tout, sa fonction.
Je reste donc soumis(e) à ce fonctionnement tant qu’aucune conscience n’est là pour faire halte, observer, reconnaître ce qui se vit en moi, et poser des choix en pleine présence.
C’est à partir de là que le chemin commence : depuis un état de soumission ou de révolte, où je me sens prisonnier(ère) de mes mécanismes intérieurs, esclave de mes croyances, de mes blessures, de mes automatismes. C’est cette posture qui génère en moi cette sensation de manque, ce manque réel de contact avec ce que je suis, ici et maintenant, dans la fraîcheur du vivant, dans la plénitude de l’instant.
La seule réponse véritable ne peut être qu’intérieure : une réponse de présence et de contact.
Pour les parts de moi qui ont été carencées en attention, en amour, en sécurité, j’ai besoin d’être accompagné(e). J’ai besoin d’un espace sûr où je peux apprendre à m’arrêter, à ressentir, à oser entrer en contact même avec la peur… pour finalement en être libre.
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